
"La vie en spirale" d'Abass Ndione disponible!
- Ousmane Sow
- 27 févr.
- 2 min de lecture
La vie en spirale de l'écrivain Abasse Ndione sera disponible dès le 28 février dans tous les points de vente des Éditions Saaraba. Ce roman, rédigé en 1970, a été publié en deux volumes par les Nouvelles Éditions Africaines de Dakar respectivement en 1984 et 1988. Ndione explique ce délai par l’opinion négative que les éditeurs africains avaient alors sur le genre policier. Redécouvert en 1998, il a été intégré à la Série Noire, se faisant reconnaître comme l'un des premiers romans noirs africains écrits en français.
À travers le témoignage d'Amuyaakar Ndooy, un jeune chauffeur de taxi clandestin accro au yamba, le chanvre sénégalais, le lecteur suit son parcours. Suite à une pénurie d'herbe, il s'engage dans le commerce depuis la Gambie et devient un fournisseur (sipikat) très recherché. Ses affaires prospèrent jusqu'à ce qu'il croise des personnages malveillants, faisant basculer son succès en un cauchemar.
Au-delà d'un captivant roman noir, La vie en spirale offre une analyse pénétrante d'une société corrompue. Comme l'affirme Ndione : « Je plonge dans la société. Je n’invente rien. » Le récit met en lumière une dynamique où les consommateurs sont traqués tandis que les trafics impliquent des figures influentes du monde des affaires et de l'administration. Même le Calife d'une grande Confrérie n’est pas épargné : « L’interdiction du yamba n’est mentionnée dans aucune sourate du Saint Coran ni dans aucun hadith du Prophète Mohammed, paix et salut sur Lui. » (1998 : 282)
Lors de sa publication au Sénégal, le roman a été critiqué pour son prétendu apologie du chanvre. Ndione répond à ces accusations dans l’édition de 1998, précisant qu'il s'agit d'une œuvre de fiction, bien qu’elle s’inspire de la réalité. Le roman peint le portrait d'une société inégalitaire où certains peinent à survivre (Amuyaakar lutte pour subvenir aux besoins de quatre personnes grâce à son activité de « taxi clando ») et sont tentés par l'illégalité.
Malgré ses ambitions, Amuyaakar ne prétend pas à la facilité : « Ceux que je venais de gagner grâce au trafic de yamba me déroutaient un peu. Pendant cinq ans, j’avais travaillé dur sans pouvoir faire aucune économie. Moins de deux semaines de sipikat m’avait fait millionnaire. » (1998 : 71)
La communauté musulmane de pêcheurs à laquelle appartient Amuyaakar est traditionaliste, ce qui l’amène, avec ses amis, à s'en détacher. Un passage marquant montre leur opposition au Jaraaf, au griot et aux anciens, révélant que leur révolte va au-delà de la simple quête de « développement » ou de vie nocturne. Les jeunes défendent une substance « magique » aux multiples vertus, en contradiction avec un discours officiel qui condamne l’alcool et le yamba, souvent blâmé pour divers maux sociaux.
Ndione se distingue par son inventivité linguistique, mêlant le français à l’argot des junkies sénégalais et à des termes wolofs, donnant à son écriture une grande puissance. Cette énergie se retrouve aussi dans Ramata, publié en 2000, une fresque touchante sur le destin d'une femme d'une beauté exceptionnelle, brisée par les aléas de la vie, et qui est sans conteste l’un des plus beaux romans africains.

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